RAYMOND

M. Geoffrey Koenig
M. Geoffrey Koenig

Entretien avec M. Koenig (1/2)

Je suis heureuse de vous présenter l’historien Geoffrey Koenig dans les deux prochains articles. Il a aimablement pris le temps de répondre à une série de questions que je lui ai adressées par email.

 

M. Koenig consacre ses recherches à la 19e armée allemande, en se focalisant particulièrement sur sa période de déploiement dans la Poche de Colmar. J’ai donc utilisé en partie ses travaux pour rédiger les deux notes historiques intitulées « Détails de la Poche de Colmar » et « Les derniers Mouvements avec la 19e armée allemande ». En effet, lorsque Raymond est entré dans la Poche de Colmar, il a été affecté à cette armée et les recherche de M. Koenig éclairent certains aspects de son récit.

 

 

Pouvez-vous vous présenter ? Quel est votre parcours ?

 

Je suis Geoffrey Koenig, 29 ans, originaire de Châtenois dans le Bas-Rhin où je vis toujours, marié et père d’une petite fille. Après des études d’histoire et de sociologie à l’Université de Strasbourg, j’ai réalisé un master en histoire des mondes germaniques (2018). Agrégé d’histoire (2019), j’ai enseigné au collège, au lycée et à l’université jusqu’au niveau master. Mon statut actuel est celui de doctorant contractuel en histoire contemporaine à l’Université de Strasbourg (ARCHE) et au Ministère des Armées (SHD/DMCA).

 

Cela fait quatre ans que je prépare une thèse sur l’armée allemande sur le front occidental à la fin de la Seconde Guerre mondiale (juin 1944 – mai 1945), sous la direction des professeurs Catherine Maurer et Johann Chapoutot. Pour les profanes, je suis donc chercheur en histoire militaire.

 

 

Vous faites partie du laboratoire ARCHE et du SHD, pouvez-vous nous parler de ces institutions ? quelle sont leurs missions ?

 

En tant que chercheur, je suis rattaché à des institutions de recherche.

La première est le laboratoire ARCHE (Arts, civilisations, histoire de l’Europe) de l’Université de Strasbourg. L’image d’Épinal du laboratoire est celle du lieu d’expérimentation, où des chercheurs vêtus de blouses procèdent à des expériences avec des tubes à essai et du matériel à la pointe de la technologie. Cependant, même en science humaines et sociales, nous avons des laboratoires, précisément parce que le laboratoire est avant tout une structure qui encadre la vie scientifique et au sein de laquelle plusieurs chercheurs se rassemblent, échangent trouvent des ressources pour mener à bien leurs projets. Dans le jargon académique, ARCHE est une « Unité mixte de recherche » (UMR), soit un laboratoire qui regroupe des chercheurs de l’université et du CNRS. Le laboratoire ARCHE est spécialisé en histoire, histoire de l’art et architecture médiévale, moderne et contemporaine, majoritairement de l’Europe. Nos acticités sont réparties en quatre axes, au sein desquels les différents projets de recherche de chacune et de chacun s’inscrivent. Personnellement, je travaille surtout dans le cadre de l’axe « Autorité, Contrainte, Liberté ».

 

En plus de cela, mes travaux s’inscrivent aussi dans le cadre du Service historique de la Défense (SHD), duquel je suis chercheur associé en vertu de mon contrat doctoral. Cette institution est surtout connue – dans notre milieu – parce qu’il s’agit d’un centre d’archives militaires qui compte dix sites à travers la France. Cependant, le SHD dispose aussi d’un service de recherche historique spécialisé en histoire militaire, dirigé par le professeur Walter Bruyere-Ostells. Dans le cadre de l’ouverture du Ministère des Armées au monde académique, celui-ci finance depuis 2020 (l’année de mon recrutement) des contrats doctoraux en histoire militaire.

 

 

Pourquoi vous êtes-vous intéressé à la 19e armée allemande ? Je rappelle le titre de votre livre : « l’armée tiendra jusqu’au dernier » La 19e armée allemande dans la poche de Colmar (novembre 1944-fevrier 1945), publié chez L’Harmattan. 

 

La question s’est posée en 2016, lorsqu’il a été question de trouver un sujet de mémoire de Master. Je venais de terminer des études générales de licence et je savais que je voulais travailler en histoire militaire, sans être certain de l’époque. J’ai toujours eu une (très) forte appétence pour l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, mais je n’étais pas certain de vouloir en faire ma spécialité. L’enjeu était grand puisqu’il s’agissait de choisir une période qui allait m’accompagner pendant de longues années, peut-être toute une carrière. Un moment, j’ai songé à faire de l’histoire médiévale ou ancienne, mais je suis rapidement revenu au choix du cœur.

Lorsque j’ai rencontré pour la première fois Catherine Maurer, qui allait devenir ma directrice de mémoire, je lui ai fait connaître mon souhait de travailler sur la libération de l’Alsace, plus précisément sur la poche de Colmar sur laquelle j’avais quelques connaissances. Celle-ci, historienne des mondes germaniques, m’a suggéré de me concentrer sur l’armée allemande car il y aurait certainement des éléments très intéressants à étudier. Elle ne s’est pas trompée, car lorsque j’ai dépouillé les premières archives aux archives militaires allemandes de Fribourg-en-Brisgau, je me suis rendu compte de la richesse du sujet que j’avais entre les mains. J’ai ensuite passé deux ans à travailler quasiment à temps plein sur la 19e armée allemande pour soutenir mon mémoire de master en juin 2018, qui était la version « zéro » du livre publié en 2020.

 

 

Il est rare de voir un mémoire de Master publié sous forme de livre, quels étaient le ou les manques que votre recherche a comblé dans l’historiographie de l’Alsace 1939-1945 ?

 

J’ai effectivement eu la chance de publier mon mémoire de master grâce à un prix scientifique organisé par les éditions L’Harmattan. La campagne d’Alsace avait alors fait l’objet de nombreuses publications qui étaient surtout le fait d’historiens locaux, amateurs passionnés parfois très intéressants à lire, mais qui n’ont pas été formés à la discipline historique et aux méthodes d’investigation qui sont les nôtres. Peu d’historiens professionnels s’étaient penchés sur la question, bien qu’il y eût déjà quelques bonnes références comme les travaux d’Eugène Riedweg. Plus particulièrement, aucun ouvrage n’existait sur l’armée allemande dans la poche de Colmar. Mon approche s’inscrit dans un renouvellement de l’histoire militaire qui a débuté depuis une quarantaine d’années maintenant, attentive à de nouvelles problématiques.


Je souhaitais m’éloigner le plus possible de ce que les historiens appellent péjorativement « l’histoire-bataille », soit le récit évènementiel des combats, qui de surcroît est relativement connu dans ses grandes lignes. Pour ainsi dire, cela ne m’intéressait pas de détailler la position de telle mitrailleuse sur le champ de bataille ou de discuter de l’heure à laquelle tel bombardement eut lieu. Sensibilisé aux questionnements de l’histoire culturelle, j’ai voulu élargir la focale pour restituer au mieux les multiples réalités de la guerre.


Dans les grandes lignes, ce livre me satisfait et donne des clefs de compréhensions à qui voudrait comprendre les modalités d’engagement de la 19e armée dans la poche de Colmar. L’essentiel est là, cependant ce travail n’est pas aussi abouti que je l’aimerais aujourd’hui. Trop d’erreurs – bien que secondaires – se sont glissés dans mes interprétations, qui sont celles d’un tout jeune historien en master d’histoire ! J’ai pour partie entrepris de les corriger dans d’autres publications lorsque j’en ai eu la possibilité. Évidemment, je parle avec le recul et l’expérience accumulée, mais je pense tout de même que ce livre mériterait une édition augmentée et corrigée.

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